Les camps de réfugiés sahraouis naissent à la fin de l’année 1975, à la suite de l’exode d’une partie de la population du Sahara occidental. Jusqu’alors province métropolitaine de l’Espagne, le territoire devait être soumis à un processus de décolonisation, établi par la résolution 2072 de l’Assemblée générale de l’ONU de 1965. Cependant, en raison des accords de Madrid de novembre 1975, le régime franquiste cède le territoire au Maroc et à la Mauritanie, ignorant le droit à l’autodétermination des populations sahraouies, dont le représentant unique et légitime, reconnu comme tel par l’ONU en 1975, est le Front populaire de libération de la Seguia el-Hamra et du Río de Oro (Polisario), incarnation du mouvement nationaliste sahraoui, constitué en 1973. Frappés par la guerre qui éclate entre les deux pays et le Front, les Sahraouis se réfugient à proximité de la ville algérienne de Tindouf, où ils sont secourus par le Croissant-Rouge.
Les camps se développent autour de puits et portent le nom des villes du Sahara occidental abandonnées : El Ayoun, Smara, Aouserd, puis Dakhla et Boujdour. À ceux-ci il faut ajouter Rabbouni, quartier général du Polisario et de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), proclamée par le Front en exil en février 1976. Tous les camps sont désormais reliés entre eux par des routes goudronnées. Le plus proche de la ville de Tindouf, El Ayoun, est situé à une vingtaine de kilomètres ; le plus éloigné, Dakhla, se trouve à environ 160 km. Selon les principes du découpage administratif algérien, ils ont le statut de wilaya [région]. Chaque wilaya se divise en six dawaa’ir [l’équivalent des communes] dont les noms reprennent, eux aussi, ceux des localités du Sahara occidental. Les dawaa’ir se subdivisent en quatre barrios ou hayys [quartiers]. Selon un recensement du Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies de décembre 2017, les réfugiés seraient 173 600, dont 38 % ont moins de dix-sept ans. Ils vivent pour la plupart dans des habitations en dur, devenues la norme à partir des années 2000, remplaçant ainsi progressivement les tentes : la traditionnelle khaïma à une pointe ou la guitoune à deux pointes, terme emprunté aux officiers méharistes de l’armée coloniale française. Le camp le plus important, Smara, comparable à une véritable ville, abrite 50 700 personnes.
Dès le départ, les camps ont été aménagés pour faire face aux problèmes sanitaires. Un système d’égout est établi, ainsi que des centres hospitaliers. Chaque wilaya possède des écoles maternelles, des établissements primaires, un pour chaque daïra, et, depuis 2009, des écoles secondaires. Par ailleurs, pour assurer la formation professionnelle des femmes, un camp-école est également créé, le « 27 février », date de proclamation de la RASD. Transformé en wilaya en 2012, il a pris le nom de Boujdour. Dans le même esprit, deux internats pour l’éducation supérieure pré-universitaire voient le jour : le « 9 juin », date de la mort au combat du principal chef historique du Front Polisario, Al-Wali Mustafa Sayyid, et le « 12 octobre », date de la proclamation, en 1975, de l’unité nationale sahraouie. Les camps de réfugiés jouissent du principe de l’extraterritorialité : ils sont administrés par la RASD et soumis à sa juridiction et non pas à celle du gouvernement algérien.
Le problème principal de la population réfugiée, au-delà du manque absolu de perspectives de résolution du conflit, reste la dépendance aux aides alimentaires extérieures. Actuellement, le programme alimentaire mondial de l’ONU n’assure officiellement de la nourriture que pour 90 000 individus. La coopération des ONG reste donc primordiale dans ce domaine.