Souks – Le succès des produits « Made in China »

Chaussures, jeans, foulards, vaisselle, tapis de prière, bijoux fantaisie et autres petits bibelots : les produits d’importation de consommation courante en provenance d’Asie du Sud et du Sud-Est ont envahi les marchés et les rues des villes et des campagnes du Nord de l’Afrique depuis la fin des années 1990 et l’ouverture des pays de la région au libéralisme économique et à la mondialisation (Pliez, 2007). Ces produits sont venus répondre à la demande des classes populaires ayant atteint un petit niveau de prospérité et des classes moyennes, désireuses de consommer des produits du quotidien qui étaient jusqu’alors introuvables sur les marchés. L’importation de ces marchandises a permis de répondre à une demande qui ne pouvait être satisfaite par l’offre locale. S’approvisionnant d’abord au Sud de l’Europe par des communautés de commerçants migrants (Tarrius, 2002) pratiquant le trabendo (« commerce à la valise » de menus produits), les commerçants entrepreneurs maghrébins se sont progressivement professionnalisés, achetant non plus des valises mais remplissant des conteneurs, en même temps qu’ils allaient toujours plus loin vers l’est, en direction de la source des marchandises : d’abord Istanbul, puis Dubaï (Peraldi, 2001), et enfin la Chine et plus largement l’Asie (Pliez, 2007 ; Belguidoum, Pliez, 2012). Aujourd’hui, ces produits sont présents dans tous les pays de la région, dans les villes comme dans les campagnes. Dans les souks urbains, que ce soit en Égypte, en Algérie ou au Maroc, ces produits made in China sont de plus en plus distribués dans des centres commerciaux dont le modèle s’inspire des malls que les commerçants fréquentent lors de leurs achats en gros en Asie ou à Dubaï. Avec ces produits apparaissent aussi de nouvelles habitudes, marquées par les modes de consommation occidentaux (achats de la Saint-Valentin, du jour de l’An, de maillots de football de clubs européens, etc.) ou turcs (en lien avec la diffusion et le succès des séries télévisées turques au Maghreb et au Proche-Orient), ou encore émiratis. Les produits made in China participent ainsi de l’accès à la mondialisation d’une large part de la population de la région, en même temps qu’ils transforment les modes de consommation et les espaces marchands (Bouhali, 2016).

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Auteur·e·s

Bouhali Anne, géographe, Université de Picardie Jules-Verne


Citer ce focus

Bouhali Anne, « Souks – Le succès des produits « Made in China » », Abécédaire de la ville au Maghreb et au Moyen-Orient, Tours, PUFR, 2020
https://abc-ville-mamo.univ-tours.fr/focus/souks-le-succes-des-produits-made-in-china/